2 septembre – Découverte de nouveaux villages primitifs
Journée chargée. Matinée sur le chantier à voir l’évolution des
travaux. Tout se déroule pour le mieux et cette semaine on va pouvoir
continuer à monter les murs, le chantier deviendra à nouveau
visuellement intéressant. L’écurie aussi prend forme car les fondations
sont montées sur tout le pourtour. Ce chantier va aller assez vite car
on ne va pas faire dans la dentelle mais quelque chose de rustique
solide et fonctionnel.
En ce moment, à Kuta, l’arrivée probable dans
quelques années de l’investisseur arabe EMAR met tout le monde en émoi.
Le deal semblerait que le gouvernement Indonésien mette à la
disposition gracieuse d’EMAR les terrains qu’il possède pour que ce
dernier investisse dans des hôtels respectueux de l’environnement, un
golf est aussi en projet. EMAR investit et s’associe à l’état pour le
partage des bénéfices. But inavoué, faire des hôtels de luxe pour
clientèle musulmane car tout sera fait pour le respect absolu des
règles de l’islam. Un concept comme un autre. Ce n’est encore qu’un
projet, mais les réunions succèdent aux réunions depuis deux mois.
C’est parfait pour la valeur de mon terrain car tout d’un coup j’ai
reçu plusieurs propositions de rachat par des étrangers. Japonais,
Chinois, Allemands, Australiens ou Américains sentant que c’est le
moment d’acheter des terrains, quitte à ne rien construire et attendre
que le prix monte, visitent les terrains disponibles (et
constructibles, c’est-à-dire avec « Certificat »).
Certains
s’intéressent au terrain derrière chez moi, mais j’ai une longueur
d’avance car Lalu a déjà posé ses jalons et commencé à négocier avec le
propriétaire (non avec un intermédiaire). Depuis longtemps il me parle
d’un terrain à Gerupuk (à l’extrémité Est de la baie, après Tanjung
Ann).
Pour être certain que je ne regrette pas, c’est dimanche, nous en
profitons pour partir en promenade vers 15 heures. Il a emprunté un
gros 4x4 à un ami pour mieux parcourir les pistes qui s’élancent dans
une nature encore vierge et peu habitée dès qu’on quitte la route
principale. Pendant cinq bons kilomètres à l’écart du village de
Gerupuk, nous rencontrons de petits hameaux encore plus primitifs que
les villages aux alentours de Kuta. Ici, les habitants sont tous des
pêcheurs et fermiers et vivent dans le plus grand dénuement avec les
produits de leur pêche ou de l’élevage. Des coins où pas une route
asphaltée ne vient troubler la quiétude de la nature. Idéal pour les
découvertes ethnologiques à cheval (je retiens). Nous arrivons donc
dans un petit hameau au bord de l’eau ou les femmes sont en train de
trier les algues fraîches qu’elles viennent de ramasser. Tous ces
produits partent à l’export à vil prix pour des cosméticiens. Lalu
m’explique que ce qui est à vendre c’est en fait cette plage, l’espace
du village de maisons de bois, les puits et les deux hautes collines
qui la surplombent. C’est immense. Après des palabres avec l’occupant
du coin qui nous servira de guide nous grimpons sur la colline la plus
à l’Ouest. Lalu restera en bas mais son ami chauffeur m’accompagne, il
parle anglais. La pente est très rude et le sol instable, l’escalade
pénible nais une fois arrivé à mi-pente, la vue sur toute la baie de
Gerupuk est superbe. Une fois au sommet, nous retrouvons le soleil qui
décroit et là, la vue est encore pus spectaculaire car elle embrasse
d’Est en Ouest, les baies de Gerupuk et de Kuta. C’est un point
culminant de la région. Parfaitement orienté et un sommet parfaitement
plat sur, au moins 100 mètres de large, ce qui laisse de belles
perspectives. C’est magnifique et isolé à souhait. Hélas, le gars qui
nous accompagne signale qu’une partie du terrain a déjà été vendue à un
étranger (ça va vite), et la partie qui a été vendue est précisément
celle qui s’étend à l’Ouest sur la baie de Kuta (en plus il dispose,
nous le verrons plus tard, d’une pente d’accès beaucoup plus douce et
aménageable du côté ouest). Déception. J’explique que c’est vraiment
dommage car, acheter ici, signifie prendre le risque de voir construire
un bâtiment, dont on ignore s’il sera joli ou pas, haut ou bas, en plein
devant chez soi, devant la vue du soleil couchant. Tout d’un coup le
terrain qu’il me propose perd de la valeur. Et pourtant la vue y est
aujourd’hui magnifique. Descente en équilibre instable et pratiquement
en dérapage par moments (j’ai bien fait d’emporter mes baskets). Nous
traversons à nouveau le village très propre, en tous cas sans sacs
plastiques ou emballages de saloperies sucrées que les enfants de Kuta
ou les femmes adorent mais dont ils jettent les emballages dans la rue
(comme ils le feraient avec un peau de banane ou une enveloppe de
cacahuète) mais sans réaliser que ce qu’ils viennent de jeter mettre
des années à se détruire. Ici, éloigné de tout, pas de petit magasin
pour vendre ces merdes donc pas de plastiques qui traînent et les
ordures végétales sont aussitôt recyclées par les animaux domestiques.
Rural, rustique, primitif, tout ce que vous voulez, mais écologiquement
parfait. Cherchez l’erreur ! La visite d’un étranger est l’attraction
du village, ils n’en voient pas souvent, curiosité et regards
inquisiteurs sur tous les visages. Sur le chemin du retour, je constate
que la route (enfin la piste défoncée) fait le tour de la montagne
escaladée. En effet, l’accès de ce côté est plus facile car la pente
est douce, il a fait un bon achat. Nous nous arrêtons un instant pour
voir un peu le paysage. J’ai repéré un petit promontoire qui semble
tout mignon mais, hélas, le haut n’est absolument pas plat. La vue est
cependant remarquable. En descendant, le gars qui habite une masure en
contre-bas discute un peu avec Lalu. Coup d’œil circulaire et je repère
un autre monticule qui pourrait être pas mal car superbement exposé
plein Ouest. Tout ce terrain est situé juste en dessous de celui qu’a
acheté le touriste sur le terrain qu’on vient de quitter. Jolie vue
aussi. Pendant que je crapahutais Lalu allait à la pêche aux
informations, car, ici, seuls les habitants (et les registres officiels
de la BPN) connaissent les limites et les propriétaires de chaque
parcelle. Le découpage est assez complexe car un père divise ses terres
entre ses enfants, il y a donc des bornes un peu partout. Le gars nous
montre le terrain dont il dispose et celui dont dispose son frère. Le
premier est situé en léger contrebas de ce que je viens d’explorer,
c’est joli tout plein. Le second est un peu en amont, plus près de la
piste et surtout, remonte sur tout le versant de la colline de tout à
l’heure (celle du touriste acheteur) jusqu’en haut. Moralité, si
quelqu’un venait à acheter ce terrain, le gars du haut n’aurait plus de
voie d’accès. Ah ah ah. Je reviendrais ici à d’autres heures du jour
pour voir un peu la vue, les couleurs, la chaleur etc.
En tout état de
cause je retiens cette région pour mes découvertes équestres car les
chemins sont nombreux et loin de toute agitation de la civilisation. On
est au bout du bout du monde.
C’est bon comme sensation. Le soleil est
tombé, le ciel s’embrase, c’est superbe. Pas de promenade avec Platon
ce soir.